dimanche 20 mars 2011 à 17h45
Projection / Débat "108 cuchillo de palo "
https://toulouse.demosphere.net/rv/1390
Dimanche 20/03 à 17h45 à Toulouse, la séance sera présentée par le festival Des Images aux Mots.
108 cuchillo de palo
Renate Costa - Paraguay 2010 1h33mn VOSTF - Festival des 3 Continents 2010 : Montgolfière d'Argent et Prix du Public Jeune.
TARIFS :
TARIF NORMAL : 6€
ABONNEMENT : 45€ (10 places)
Séance sur fond gris : 4€
« 108 », c'est le nombre d'homosexuels apparaissant sur la première liste mise en place par la dictature d'Alfredo Stroessner, dans les années 1980 au Paraguay. Toutes les personnes citées sur ces listes furent arrêtées, torturées, et virent leur homosexualité révélée au grand jour, dans une société qui ne l'acceptait guère… D'autres listes suivirent, d'autres arrestations, et bien des non dits demeurent autour de cette période…
Renate Costa, jeune Paraguayenne de 29 ans, revient à Asunción où elle est née pour éclaircir le mystère entourant la vie et la mort de son oncle, Rodolfo Costa, il y a dix ans. Rodolfo qui, refusant de devenir forgeron comme son père et ses frères, avait choisi de devenir danseur, et qui fut toujours mis à l'écart du reste de la famille, traité avec méfiance. Pour mieux comprendre qui il était, Renate interroge les gens qui l'ont connu, travestis, professeur de danse, voisins… Chacun témoigne, difficilement, tentant de rompre la chape de plomb des années de silence et de retenir l'émotion des souvenirs. La cinéaste elle-même s'implique à tous les niveaux. Elle commente en off son enquête, sans faire fi de sa dimension affective ni des difficultés qu'elle rencontre, nous faisant ressentir la composante émotionnelle de son enquête. Mais le film réussit surtout à rendre inextricables l'intime et le politique, à évoquer la période dictatoriale via la vie qu'a menée Rodolfo, vie déviante devant rester cachée, vie violemment condamnée. Si la dictature n'est plus aujourd'hui au Paraguay, les plaies qu'elle a ouvertes ne semblent pas complètement refermées. En tentant d'approcher un défunt, Renate s'approche du passé de son pays, et de ses résonances dans le présent.
L'enquête est aussi un émouvant échange entre un père et sa fille, l'une interrogeant souvent l'autre. Homophobe convaincu, le frère de Rodolfo ne sait visiblement pas grand-chose de la vie de ce dernier. Parce qu'il n'a jamais voulu voir, on le devine, parce qu'il préfère la facilité de l'ignorance. Les échanges entre Renate et lui peuvent être assez tendus. Elle s'insurge contre son intolérance homophobe, elle lui reproche d'être incapable de parler d'intimité, mais la tendresse, la tolérance et l'amour dominent la relation. Le film s'achève sur une scène forte, où tous deux se font face, dans le silence suivant la révélation. Si Renate à la fin s'en va libérée, prête à aller de l'avant, elle laisse ouverte la question de ce qu'il advient de son père qu'elle a contraint à ne plus fuir.
Cuchillo de Palo est un film mélancolique avançant comme sur un fil, précautionneusement. La cinéaste nous entraîne avec délicatesse dans son enquête, qui s'ouvre progressivement, de l'intimité à l'historique, du passé à l'actuel, d'une histoire de famille à la question du rapport à l'Autre, à la Différence.
D'après Marion Pasquier - critikat.com