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lundi 23 mai 2011 à 20h

Projection/Débat : Women without man, Iran 1953

Lundi 23 mai à 20h à Toulouse, dans le cadre des 50 ans d'Amnesty International, séance unique suivie d'une rencontre avec des membres d'Amnesty International Toulouse (achetez vos places à partir du 14 mai).

WOMEN WITHOUT MEN, Iran 1953

Shirin NESHAT - Iran/Autriche 2009 1h35mn VOSTF - avec Pegah Ferydoni, Arita Shahrzad, Shabnam Tolouei, Orsi Toth... Scénario de Shirin Neshat et Shoja Azari, d'après le roman de Shahrnush Parsipur. Lion d'argent, Meilleur réalisateur, Festival de Venise 2009.

Du 23/05/11 au 23/05/11 à Toulouse - Du 27/04/11 au 10/05/11 à Tournefeuille

WOMEN WITHOUT MEN, Iran 1953
TARIFS :
TARIF NORMAL : 6€
ABONNEMENT : 45€ (10 places)
Séance sur fond gris : 4€

Ce beau film nous raconte une foultitude de choses sur l'Iran, les femmes qui y vivent et rappelle que l'Iran d'aujourd'hui, honni par les pays occidentaux, montré du doigt comme la pire des dictatures, est la résultante de la politique menée par ceux-là même qui le dénoncent aujourd'hui… Shirin Neshat est une photographe et une vidéaste connue et reconnue dans le monde entier (en particulier pour ses portraits de femmes entièrement recouvertes de calligraphie Farsi dans la série « Women of Allah »). Son regard ne ressemble à aucun autre et son film parle à la sensibilité autant qu'à la raison. Rien n'est gratuit chez elle : la beauté des images fait constamment sens.
Téhéran, 1953. Quatre femmes, issues de classes sociales différentes, se retrouvent pour quelques jours. Fakhri, prisonnière d'un mariage malheureux, s'émeut pour un ancien amoureux revenu des États Unis ; Zarin est une jeune prostituée ; Munis, bouleversée par le climat d'agitation politique qui règne, doit résister aux règles imposées par un frère ultra religieux dont sa meilleure copine, Fazeh, pas du tout politisée elle, s'est entichée… L'Iran est encore une démocratie, mais plus pour longtemps, ce mois d'août va lui être fatal.

En 1951, Mossadegh a nationalisé le pétrole jusqu'alors entre les mains des Britanniques, et les occidentaux ne sont pas contents du tout du tout. L'Iran est alors le premier producteur mondial… Il reste néanmoins premier ministre, malgré ses divergences avec le Shah, et non sans problèmes : il démissionne puis est rétabli sous la pression de la rue. Mais la CIA, intervenant en sous-main, ira jusqu'à soudoyer les militants du parti de Mossadegh pour le ronger de l'intérieur et fomentera le coup d'état du mois d'août 53 (opération Ajax), qui l'éliminera de la scène politique et l'enverra en prison.
Le 15 août 1953, le Shah, assuré du soutien des Américains, reprend les choses en main et impose un régime d'une dureté et d'une férocité dont ses alliés s'accommodent sans états d'âme (les occidentaux reprendront le contrôle du pétrole) : ils l'aideront à éliminer toute opposition dont la partie la plus radicale et la plus religieuse, réfugiée à l'étranger, préparera depuis son exil (notamment en France) la mise en place de la République Islamique que l'on connaît depuis 1979…
Mossadegh était le Premier ministre le plus « pro-américain » que l'Iran ait connu, il était un laïque convaincu que la religion doit être tenue à l'écart du pouvoir politique, refusant le ministère de la culture à Mehdi Bazargan, persuadé que celui-ci « mettrait le voile sur la tête de toutes les filles à l'école »… Suivant leur logique habituelle, c'est celui-là qu'ont éliminé les occidentaux…

Le film ne raconte pas l'histoire mais nous la livre par bribes, très liée aux destins personnels de ces quatre femmes. A la fois témoignage, à la fois poème visuel enraciné dans la culture persane, il a une forme plutôt surréaliste qui donne a sentir l'oppression des femmes, la révolte d'un peuple, autant de l'extérieur que de l'intérieur même des personnages ; l'usage habile de métaphores, celui de la couleur et du noir et blanc, magnifique, donnent autant à sentir qu'à penser. L'auteur du roman dont est tiré le film est également une femme et si la réalisatrice est née bien après les événements de 53, Shahrnush Parsipur, elle, a connu des années d'emprisonnement, la séparation d'avec les siens, la pauvreté, la maladie… sans pour autant cesser d'être d'un optimisme et d'un engagement à toute épreuve.
Le rôle du voile ou du tchador a dans le film une importance à la fois esthétique et métaphorique. Si à l'époque les femmes avaient le choix de le porter ou non, ici cela vient en écho de la période actuelle : certains y voient un symbole de « répression » tandis que d'autres y voient un moyen d'affirmation, voire de « libération »… Et la subtilité de l'approche de Shirin Neshat souligne que nous ferions erreur en nous accrochant à des notions trop simplistes. Bien entendu, le film n'a pas été diffusé officiellement en Iran, pas plus que les photos de « Women of Allah »…

Women without men, un magnifique écho aux préoccupations d'Amnesty International. La dédicace du film à la mémoire de « ceux qui ont perdu la vie en luttant pour la liberté et pour la démocratie en Iran de la révolution constitutionnelle de 1906 au mouvement vert de 2009 » ne peut laisser indifférents membres et sympathisants d'Amnesty International qui ont vu les manifestations pacifiques du peuple iranien être réprimées de manière sanglante ces deux dernières années.
Par cette dédicace, si Women without men traite de la période révolutionnaire de 1953 et du coup d'Etat qui a installé le Shah au pouvoir, il fait explicitement écho à la contestation actuelle du régime islamique en en Iran ; mieux, en donnant à voir au spectateur une période relativement méconnue en Occident, il éclaire sous un jour nouveau les continuités et ruptures historiques qui ont conduit à la situation actuelle.

Source : http://www.cinemas-utopia.org/toulouse/index....

Lien : https://toulouse.demosphere.net/rv/1967