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dimanche 4 décembre 2011 à 11h

Projection-débat "L'exercice de l'état"

Dimanche 4 décembre, petit déjeuner à Tournefeuille puis projection à 11h suivie d'un moment d'échange à bâtons rompus entre vous, spectateurs, et un ou plusieurs membres de l'équipe d'Utopia (comme d'hab', apportez les croissants, on offre le café).

L'EXERCICE DE L'ÉTAT

Écrit et réalisé par Pierre SCHOELLER - France 2011 1h52mn - avec Olivier Gourmet, Michel Blanc, Zabou Breitman, Sylvain Deblé, Didier Bezace, Jacques Boudet, François Chattot, Arly Jover... Prix de la Critique Internationale, Festival de Cannes 2011.

Du 26/10/11 au 20/12/11 à Toulouse - Du 01/12/11 au 20/12/11 à Tournefeuille

L'EXERCICE DE L'ÉTATClearstream, emplois fictifs, valises africaines, attentat de Karachi aux mystérieuses implications politiciennes hexagonales : à quelques mois de l'élection présidentielle, les affaires se succèdent et contribuent à éloigner, un peu plus jour après jour, l'électeur de la vie politique et des élus. Alors que le sentiment du « tous pourris », fleurant parfois le vieil anti-parlementarisme rance des années trente, se répand dans l'opinion, un film salvateur déboule, une œuvre captivante, bouleversante et juste qui sonne tel un sursaut républicain. Un portrait de la fonction gouvernementale tout en cruauté et lucidité mais ne cédant jamais au manichéisme, à l'heure ou nos gouvernants nous inciteraient franchement à la haine incontrôlée.
On va suivre Bertrand Saint-Jean, ministre des Transports, dont on comprend vite qu'il est un homme d'ouverture, plutôt gentiment centriste et raisonnablement social dans un gouvernement ultra-libéral. Dès la première séquence, on est plongé violemment dans le bain de la politique-spectacle. Le film démarre en trombe, il nous happe, il ne nous lâchera plus jusqu'à la séquence finale !

Bertrand Saint-Jean est en train de faire un rêve - étrange mais chut ! On vous laisse en découvrir la teneur - quand le téléphone le réveille en pleine nuit : un tragique accident de car vient de se produire dans l'Est de la France. Il doit se rendre immédiatement sur les lieux et assurer la représentation gouvernementale. Toute l'intelligence et la puissance du film sont dans cette première séquence : on y voit la tyrannie de l'urgence, qui impose à l'homme politique, même s'il est impuissant, de s'exprimer coûte que coûte, on y découvre les sentiments contradictoires de l'homme derrière la fonction et puis surtout et avant tout on y mesure la perversité du jeu de la communication, consistant à savoir employer le ton juste en toute situation. La suite est une description fascinante, à travers quelques personnages, du travail d'un ministère et de ses jeux politiques, entre trahisons envers de vieux amis devenus indésirables au nom de la raison d'État, couleuvres à avaler pour rester dans les grâces du président, complaisance obséquieuse de l'entourage du ministre et des conseillers favorisant la déréalisation totale vis-à-vis du monde extérieur.
Parmi les personnages gravitant autour du ministre, on retient particulièrement la conseillère en communication (Zabou Breitman, remarquable), la seule qui comprend réellement les failles de son patron et lui dit parfois ses quatre vérités, mais surtout son directeur de cabinet, archétype du haut fonctionnaire rigoureux, de l'exécutant honnête, qui accepte de se taire et d'être perpétuellement dans l'ombre pour le service de l'État. Un homme de devoir magnifiquement campé par un Michel Blanc tout en dignité hiératique. Le ministre lui-même, c'est Olivier Gourmet, qui apporte son ambivalence, sa truculence charismatique cachant une faille, sa sensibilité enfouie sous le masque de la fonction.
Quant à la mise en scène, brillante et novatrice (étonnant défilé à l'écran par exemple des SMS qui arrivent, stigmatisant ainsi le ridicule de l'immédiateté), elle alterne dialogues saignants et brillants, qui expriment toute la complexité et le cynisme du jeu politique, et rythme soutenu, digne d'un thriller, avec une scène finale stupéfiante et inattendue, dont on ne vous dira rien, suggérant, dans une sorte de retournement moral, que la politique telle qu'elle est devenue est une forme de guerre brutale où celui qui s'écarte du chemin y laissera forcément des plumes.

Pierre Schoeller, déjà réalisateur du remarquable Versailles, avec Guillaume Depardieu, qui évoquait le sort d'un SDF vivant dans les forêts de la région parisienne et posait un regard sur les privilégiés du point de vue des plus démunis, dit avoir réalisé, avec L'Exercice de l'État, le deuxième volet d'un triptyque qui s'achèvera avec un film sur la Révolution Française. À l'heure où la cinquième République semble sombrer et où ses idéaux républicains, hérités de 1789 puis du Conseil National de la Résistance, sont bafoués, l'œuvre de Pierre Schoeller semble essentielle et invite, sans qu'elle ait besoin d'y insister, à un réveil citoyen.

Lien : https://toulouse.demosphere.net/rv/3012
Source : http://www.cinemas-utopia.org/toulouse/index....