mercredi 10 novembre 2010 à 18h
Rencontre/Débat: Albert Ogien & Roland Gori
Albert Ogien & Roland Gori
https://toulouse.demosphere.net/rv/433
Les Fabriques démocratiques de la soumission
Les Fabriques démocratiques de la soumission. Débat avec Roland Gori (auteur du livre De quoi la psychanalyse est-elle le nom ?, éditions Denoël) et Albert Ogien (co-auteur de Pourquoi désobéir en démocratie, éditions La Découverte).
Albert Ogien est sociologue, directeur de recherches au CNRS et enseignant à l'EHESS. Il est notamment l'auteur de : Les règles de la pratique sociologique (PUF, 2007) et Les formes sociales de la pensée (Armand Colin, 2007).
Sandra Laugier est professeur de philosophie à l'université de Picardie. Elle est l'auteur de : Les sens de l'usage (Vrin, 2009), Éthique, littérature, vie humaine (PUF 2006), Une autre pensée politique américaine (Michel Houdiard, 2004).
Pourquoi désobéir en démocratie. Les raisons de se révolter ne manquent pas. Mais on ne se révolte pas n'importe comment : en démocratie, s'engager dans un combat contre l'injustice, l'inégalité ou la domination est un geste qui doit s'exprimer sous une forme d'action politique acceptable. Parmi ces formes se trouve la désobéissance civile qui consiste, pour le citoyen, à refuser, de façon non-violente, collective et publique, de remplir une obligation légale ou réglementaire parce qu'il la juge indigne ou illégitime, et parce qu'il ne s'y reconnaît pas. Cette forme d'action est souvent considérée avec méfiance : pour certains, elle ne serait que la réaction sans lendemain d'une conscience froissée puisqu'elle n'est pas articulée à un projet de changement politique ; pour d'autres, à l'inverse, elle mettrait la démocratie en danger en rendant légitime un type d'action dont l'objet pourrait être d'en finir avec l'État de droit.
Roland Gori est professeur de psychopathologie à l'Université d'Aix-Marseille I et psychanalyste, membre d'Espace analytique. Il a notamment publié Logique des passions (Denoël 2002), La Santé totalitaire (Denoël 2005), Les Exilés de l'intime (Denoël 2008). Il est l'un des instigateurs de l'Appel des appels qui rassembla 75 000 signatures, en 2009, contre la destruction du service public et du lien social.
De quoi la psychanalyse est-elle le nom ? Transformer le sujet individuel en objet à gérer ou, pire, en problème technique à traiter, telle est la dérive qui s'en emparée aussi bien de la médecine que de la politique ou de l'économie. En psychiatrie, cette évolution est flagrante. L'idéologie sécuritaire y établit une confusion entre maladie mentale et délinquance, entre soin, détention et sanction. La folie devient une maladie du cerveau et son traitement une molécule comme une autre. Face à cette évolution dangereuse et à ce que Roland Gori appelle un « pétainisme culturel », la psychanalyse propose une attention au détail, à la trace, qui apparaît comme un antidote. Les attaques dont elle est chaque année la cible, quand bien même elles émaneraient d'auteurs qui se disent « de gauche », comme Michel Onfray, expriment à leur façon ce désir mortifère de gestion de l'intime. L'humanité dans l'homme : voici ce dont la psychanalyse peut aujourd'hui être le nom. À condition qu'elle ne se transforme pas en idéologie ou en religion, mais qu'elle abrite un perpétuel questionnement.