mardi 30 novembre 2010 à 18h
Rencontre: Charles Dantzig "Pourquoi lire ?"
https://toulouse.demosphere.net/rv/691
Rencontre avec Charles Dantzig autour du livre Pourquoi lire ? (éditions Grasset).
Charles Dantzig a fait son droit à Toulouse. Il travaille dans l'édition depuis une vingtaine d'années (Belles Lettres, Grasset). Il est l'auteur de nombreux romans, essais et recueils de poésie. Ses livres Dictionnaire égoïste de la littérature française (Grasset 2005) et Encyclopédie capricieuse du tout et du rien (Grasset, 2009) ont eu beaucoup de succès.
« Pourquoi lire ? C'est le titre du nouvel essai de Charles Dantzig, l'homme qui pose les questions auxquelles on n'a pas pensé. Il y a quelques années, il avait surpris son monde avec À quoi servent les avions ? (éd. Les Belles Lettres), un recueil de poèmes. Il y répondait en partie, mais, là, il botte en touche. "Lire ne sert à rien. C'est bien pour cela que c'est une grande chose. Nous lisons parce que ça ne sert à rien" (p. 235). Le lecteur est bien avancé, dira-t-on. Mais ce n'est pas le problème. La saveur de ce petit traité est ailleurs, dans la manière qu'a Dantzig de ferrer le sujet, celle qui a fait la réputation de son Dictionnaire égoïste de la littérature française (2005). […]
Si, en ouvrant ce livre, on ne sait pas pourquoi on lit - en particulier Pourquoi lire ? - on se fait vite une raison : pour le plaisir de la digression. Charles Dantzig est le genre d'homme à ne pas suivre la direction qu'il a indiquée. Chauffeur de taxi, il se serait retrouvé sur la paille ; écrivain, il a de beaux jours devant lui. Un exemple ? Un auteur, écrit-il, a son salut assuré si un lecteur retient l'une de ses phrases, "une seule, qui contiendra toutes les autres dans sa mémoire et l'aidera à entretenir un intérêt, une affection, une possibilité de relecture." De là, l'essayiste bifurque sur la nature de la maxime, "essence" de l'écrivain, mais aussi "cartouche" utilisée pour tirer à vue sur "l'homme" sujet de prédilection de l'auteur de maximes, un type qui a en général "mal réussi sa vie", dans le genre de La Rochefoucauld (soldat raté), de Vauvenargues (loser sous la Fronde) et de Chamfort (né roturier dans un siècle aristocrate). Conclusion de Dantzig, après tous ces méandres dignes de la fameuse route de Birmanie : "On appelle ces auteurs des moralistes. Voilà pourquoi on ne les trouve qu'en France, le pays des mœurs qui jugent. Pire, qui concluent. Un Français est un homme qui cherche à savoir qui couche avec qui afin d'en déduire des causes." » Emmanuel Hecht, L'Express